Je me baladais dans les rues d’Edimbourg, mes écouteurs dans les oreilles et Aurora chantant de sa voix cristalline. Je fermais parfois les yeux et me laissais aller à quelques gestes, habitée par la mélodie, un peu comme si j’étais seule au monde.
Edimbourg en novembre, c’est la solitude en définition. Seuls les habitants vont et viennent. Pas de touriste, mais des gens venus des quatre coins du monde pour étudier ici. Des vrais Scots aussi, vivant ici depuis des années, que dis-je, des générations. Les accents se mélangent pour donner un lieu riche et chaleureux, humain. Je pensais à tout cela en écoutant Aurora. Je pensais à tout cela en allant faire mes courses, à pied. Car tout se fait à pied ici. Que ce soit le Sainsbury qui est à chaque coin de rue, ou le Lidl se trouvant toujours un peu plus loin mais s’adaptant davantage à des budgets d’itinérantes comme moi.
J’aime l’Ecosse en automne. En été, en toute saison finalement, mais novembre est un mois particulier pour moi, c’est le mois où je gagne un printemps. Fêter mon anniversaire dans cette contrée qui était déjà chère à mon cœur avant même d’y mettre un pied a été d’une douceur unique. J’étais seule pendant cette journée spéciale, ce qui n’est jamais arrivé une seule fois dans ma vie. Alors j’ai décidé de m’occuper, ou plutôt me gâter. Petite grasse matinée, petit temps pour prendre soin de moi, petit restaurant que je voulais essayer depuis longtemps mais que mes finances me gardaient d’y aller. Et comme les étoiles se sont alignées ce jour-là, un problème de TPE m’a fait réaliser que ma carte n’était pas passée une fois dans la rue en lisant le message d’erreur sur le ticket. Un coup d’œil à l’intérieur et je vis que le serveur n’avait lui non plus pas prêté attention à la non-validation de ce paiement. Si cela avait été un jour quelconque, j’aurais couru dans le restaurant en quête de recommencer et valider le règlement de ce bon repas qui m’avait ravie. Mais je me suis dit que ce n’était pas cette somme qui allait couler la chaîne de pizzeria existant dans tout le Royaume-Uni. Et puis je décidai qu’après tout, ce serait mon cadeau. Je retrouvai mes amis de quelques mois le soir pour de joyeuses conversations, encore un restaurant et quelques verres au pub du coin.
Lorsque j’y repense, j’ai fêté mon anniversaire de beaucoup de manières différentes ces dernières années, toujours entourées d’amis de longue date, certains que j’ai gardé, d’autres qui sont absents de ma vie aujourd’hui. Toujours dans la joie et la bonne humeur avec ces amis ; un peu empreint de malaise avec ma famille. Mais toujours, toujours entourée. J’aurais bien évidemment redouté une telle journée à passer seule, j’aurais déprimé d’avance, pleuré même. Mais ici, tout pourrait m’arriver, je le prendrais avec philosophie et en tirerait même avantage. Ce pays me transforme. Je me sens différente ; ma relation aux autres, à mon environnement a changé. Je suis sûre de moi, courageuse, audacieuse même. Ces moments comme celui-ci où je suis simplement sortie de mon auberge pour aller faire des courses, à dix-sept heures, la nuit déjà tombée, tout étant calme et Aurora me chantant à l’oreille la femme qu’elle est. Ces moments de flottement sont tout ce que j’aime je les chérie et j’en savoure chaque seconde.
Wilaukee S.